Enfin ! Après des mois de concertation, le grand projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement a entamé son parcours parlementaire. Déposé au mois de juin à l’Assemblée nationale, il a été voté en première lecture le 17 septembre et attend maintenant d’être examiné par les sénateurs. Le texte porte en lui de belles perspectives, par ailleurs nécessaires à la vie publique : il est censé anticiper toutes les conséquences du vieillissement de la population, un phénomène que l’on sait désormais massif. En 2060, un tiers de la société française sera composé de plus de 60 ans ! Les plus de 85 ans seront, eux, près de 5 millions, contre 1,4 million aujourd’hui…seniors sport

 

Le projet de loi sera-t-il à la hauteur de l’enjeu ? Il se définit sur trois axes, que sont l’anticipation de la perte d’autonomie, l’adaptation de la société et l’accompagnement des seniors en perte d’autonomie. Car qui dit vieillissement de la population, dit rôle croissant des aidants, comme ont été baptisés tous ces acteurs de l’ombre qui aident, au quotidien, un parent, un ami ou un voisin devenu malade, handicapé ou simplement dépendant. Le texte prévoit en outre de professionnaliser les services d’aide à domicile pour améliorer la qualité de la prise en charge de nos seniors, d’augmenter les plafonds de l’allocation personnalisée d’autonomie à domicile (APA) et même de diminuer le reste à charge des aînés les plus modestes.

Le volet consacré à l’anticipation de la perte d’autonomie doit quant à lui permettre de repérer les facteurs de risque de la perte d’autonomie, pour mieux les combattre ; il s’agit avant tout des inégalités sociales et de celles liées à la santé. Comment ? En consacrant plus de moyens financiers aux actions de prévention, en luttant contre l’isolement au travers du programme associatif Monalisa (Mobilisation nationale contre l’isolement des personnes âgées) qui monte localement des équipes bénévoles engagées dans un projet d’entraide intergénérationnelle, ou en favorisant une meilleure nutrition, un meilleur usage du médicament et des réponses sanitaires mieux adaptées.

Avec quels moyens ?

Enfin, la partie du projet de loi visant l’adaptation de la société à sa seniorisation imagine notamment un meilleur habitat pour personnes âgées, qu’il soit collectif en investissant dans les foyers-logements ou individuel en adaptant 80 000 logements privés d’ici 2017, parce que nombreux sont ceux qui préfèrent vieillir chez eux. Le texte crée par ailleurs un Haut Conseil de l’âge, instance qui représentera les seniors au niveau national afin qu’ils puissent participer à la mise en œuvre des politiques publiques qui les concernent. Oui, mais…

Consulté pour avis, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a certes jugé que le projet de loi apporte des solutions – en revalorisant l’APA, en donnant aux aînés des droits et une représentation… ‒ mais il a souligné l’absence de financements ad hoc. Toutes les mesures réunies dans le texte bientôt examiné au Sénat nécessitent en effet bien plus que les 645 millions d’euros prévus actuellement, issus de la seule contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie (CASA). Car si cette taxe créée l’an dernier aidera les plus vulnérables d’entre nous en étant affectée justement au financement de la dépendance, il faut savoir qu’elle est prélevée sur les retraites et pensions d’invalidité… En outre, la question du financement des maisons de retraite médicalisées n’est pas abordée. Beaucoup de bonnes intentions, donc. Mais un projet de loi qui n’a pas encore les moyens de ses ambitions.